Informations générales
République à nos jours
Les débuts de la République
L’indépendance commence officiellement le 28 juillet 1821, mais devient réellement effective à partir de 1824. Après un début confus et agité comme toute nouvelle république, Ramón Castilla, le président élu en 1845, organise la vie politique et économique, abolit l’esclavage et la peine de mort, instaurant une paix intérieure.
En 1854, commence une ère de grande prospérité qui durera 25 ans, grâce à l’extraction et l’exportation dans le monde entier du célèbre guano des îles (la fiente d’oiseaux), un des meilleurs engrais du monde. Mais surexploitée et mal gérée, la principale ressource économique de l’état s’épuise rapidement, entrainant le pays vers une inévitable crise économique.
Un siècle d'instabilité
Le Chili déclare la guerre à la Bolivie pour un désaccord sur les traités commerciaux de l’exploitation du salpêtre et du guano par des entreprises anglo-chiliennes dans le désert d’Atacama sur la côte bolivienne. Dans le cadre d’un traité d’alliance défensive avec la Bolivie, le Pérou entre dans le conflit. La Chili sort grand vainqueur de la Guerre du Pacifique (1879 à 1883), la Bolivie perd ses provinces côtières et son accès à l’océan et le Pérou deux provinces au sud.
Juste à la fin de la guerre, le Pérou retrouve rapidement la prospérité avant la fin du XIXe siècle grâce notamment à l'épopée du caoutchouc, cependant entachée de nombreuses agitations sociales. Les richesses et le pouvoir sont toujours aux mains de quelques privilégiés. Comme partout en Amérique Latine, l’état préfère importer des produits d’Europe plutôt que d’encourager une industrie locale. Se succèdent alors des gouvernements plus ou moins totalitaires inspirés par le fascisme allemand, espagnol et italien.
En 1941, un désaccord sur la frontière du nord provoque un conflit avec l’Equateur qui dure 8 mois et qui ressurgit 50 ans plus tard, en 1995.
Pendant les années 60, les gouvernements tentent de moderniser le pays sans grand succès. L’agitation s’amplifie dans les campagnes et des guérillas marxistes commencent à apparaitre.
Réforme agraire - 1969
En 1968, le général Juan Velasco Alvarado prend le pouvoir par un coup d’état et met en place l’année suivante la grande réforme agraire que ses prédécesseurs n’avaient pas pu concrétiser: l’expropriation de plus de 5.000 grands propriétaires et la distribution de 11 millions d’hectares à des coopératives agricoles.
Mais les paysans ne sont pas prêts à travailler sans être dirigés, une mauvaise gestion provoque la crise de l’agriculture et les membres des coopératives se répartissent les terres entre eux, ce qui a quand même comme résultat qu’aujourd’hui la plupart des agriculteurs péruviens sont propriétaires de leurs terrains.
Le séisme le plus meurtrier du Pérou
Le dimanche 31 mai 1970, un tremblement de terre de magnitude 7,8 secoue le centre du Pérou. Dans les villes côtières comme Chimbote, 80 à 90% des habitations sont détruites, mais c’est la Cordillère Blanche qui est la plus touchée, la ville de Huaraz est détruite à 97%. Un glacier se détache du Huascarán (le pic le plus élevé du pays), dévale la pente entrainant d’énormes rochers qui ensevelissent la petite ville de Yungay et ses 20.000 habitants. Au total on dénombre 66.000 morts et 20.000 disparus.
Années 80 - les années noires
En 1980 la démocratie s’installe de nouveau avec le Président Fernando Belaúnde. La même année, le groupe terroriste maoïste Sentier Lumineux (officiellement le Parti Communiste Péruvien) dirigé par Abimael Guzmán, un ancien professeur de philosophie, déclare la guerre à l’état péruvien.
A partir de 1983 s’installe un régime de terreur dans les Andes. Le groupe, allié aux narcotrafiquants, massacre des milliers de paysans et d’autorités locales qui refusent de rallier leur cause ou n’acceptent pas le racket. Peu après, apparait une autre organisation terroriste inspirée des guérillas gauchistes, le Mouvement Révolutionnaire Túpac Amaru MRTA, spécialisée dans les enlèvements, voitures piégées et assassinats.
En 2000, la Commission de la Vérité a dénombré 69.280 victimes de ces guerres internes.
La réaction du Président Belaúnde est plutôt timide, il est déjà confronté à une grave crise économique due aux mauvaises gestions de la décennie précédente, à la chute du prix des métaux et aux conséquences d’un très fort phénomène du niño qui affecte tout le nord du pays.
En 1985, le nouveau Président de centre gauche Alan García Pérez, un jeune homme de 36 ans aux airs de séducteur auquel il suffit de rajouter une lettre à son prénom pour le surnommer "el Galan" , entame des réformes hasardeuses pour essayer de relever le pays, refusant par exemple de payer la dette extérieure et nationalisant le système bancaire. Après deux années de croissance, les investisseurs étrangers se retirent et une crise sans précédent se produit.
Malgré le changement de monnaie du "sol" à "l’Inti" , l’inflation déjà très élevée avant son mandat atteint en 1990 le record de 7.649%, le terrorisme est à son apogée et García est soupçonné de corruption généralisée, ce qui provoque sa fuite en 1992 vers Paris où il se réfugie jusqu’en 2001.
Années 90 - le grand changement
Alberto Fujimori - 1990 a 2000
En 1990, Alberto Kenya Fujimori Fujimori, un indépendant fils d’émigré japonais, remporte les élections face au célèbre écrivain Mario Vargas Llosa (prix Nobel de littérature en 2010).
Sous l’influence du FMI, il entame une restructuration radicale de l’économie (shock) pour contrôler l’inflation et change une nouvelle fois la monnaie pour le "nuevo sol". Sa politique néolibérale fonctionne, stabilisant l’économie et attirant l’investissement étranger, il atteint même une croissance record de 13% en 1994. La contrepartie est la chute des salaires, la montée du chômage et l’installation d’une activité économique informelle toujours en vigueur vingt ans plus tard.
Le Chino (Chinois) comme le surnomme amicalement la population, mène également une guerre sans merci contre le terrorisme et réussit en 1992 à faire emprisonner tous les dirigeants et des centaines de guérilleros des deux mouvements.
Peu suivit par le congrès pour ses réformes radicales, il décide un auto-coup d’état en 1992, réformant la constitution pour donner plus de pouvoir au Président. Fujimori commence à améliorer les réseaux routiers, désenclave de plus en plus les zones andines, favorise de nouveau le tourisme, ébauche des plans sociaux. Soutenu par les classes sociales défavorisées, il est réélu en 1995 grâce à ses excellents résultats économiques et pour en avoir terminé avec le terrorisme.
Prise d'otages
En décembre 1996, un groupe armé du MRTA investit la résidence de l’ambassadeur du Japon à Lima lors d’une réception mondaine et fait près de 600 prisonniers, tous des personnalités du monde politique et économique. La prise d’otage dure quatre mois. Les forces spéciales délivrent les 140 personnes encore présentes, éliminant les 14 terroristes, certains dans l’action, d’autres exécutés sur place par les militaires. Cette intervention avait pour nom de code Opération Chavín de Huántar en référence aux tunnels creusés pour accéder à la maison dont les plans ont été inspirés par l’ingéniosité des couloirs réalisés par les Chavin dans les Andes centrales il y a près de 3.000 ans.
2000 - le grand scandale
Alberto Fujimori est élu pour la troisième fois, malgré une baisse de la croissance et des rumeurs de corruptions.
Les "Vladi-vidéos"
Un mois plus tard, son fidèle assesseur Vladimiro Montesinos, qui était également le chef des services secrets et qui avait l’habitude de filmer tout le monde, se fait prendre à son propre piège avec la sortie au grand jour d’une vidéo qui le montre offrant $15.000 à un congressiste de l’opposition pour soutenir Fujimori. Le visionnage de centaines de vidéos retrouvées dans la maison de Montesinos dévoile que beaucoup de congressistes, patrons de médias, journalistes et hommes d’affaires font partie de cette méga corruption. Montesinos en fuite est arrêté un an plus tard au Venezuela et jugé à 15, 20 et 25 ans de prison respectivement pour corruption, trafic d’armes avec les FARC de Colombie, exactions et exécutions sommaires lors de la guerre contre le terrorisme, entre autres. Auparavant, Fujimori l’avait remercié de ses bons et loyaux services en lui octroyant une prime de licenciement de US$15 millions.
Exile et retour de Fujimori
Deux mois plus tard, le Chino se rend à une réunion des pays du Pacifique au Brunei et au lieu de revenir au Pérou, s’envole pour le Japon où il reçoit la nationalité nippone en tant que fils de japonais. Depuis Tokyo, il envoie un fax annonçant sa démission. Le Japon refuse son extradition puisque sa législation interdit d’extrader ses propres ressortissants.
Toujours adulé par une bonne partie de la population, principalement dans les campagnes, Fujimori décide de se présenter aux élections de 2006 et veut revenir au Pérou. A peine débarqué à Santiago du Chili, il est arrêté puis extradé vers le Pérou. Il est condamné à 25 ans de prison pour violation des droits de l’homme en raison de ses actions trop radicales durant la lutte contre le terrorisme, des tueries de supposés terroristes perpétrées par une police secrète et sur le détournement de US$600 millions de biens de l’état dont il est accusé, il ne reconnait que les $15 millions donnés à son assesseur.
La polémique
Considéré par certains comme le sauveur du Pérou, stoppant le terrorisme, mettant en place les bases de l’essor économique actuel et les premiers avantages sociaux, pour les autres c’est un terrible dictateur, bafouant les droits de l’homme et totalement corrompu.
2000 à 2010 - la montée en puissance
Alejandro Toledo - 2001 a 2006
Après la fuite de Fujimori, un gouvernement provisoire est installé dirigé par Valentin Paniagua.
En 2001, est élu le premier Président indien d’Amérique, Alejandro Celestino Toledo Manrique, le Cholo (terme populaire, péjoratif ou amical, pour désigner un indigène), issu d'une famille modeste et boursier pour étudier à Standford (Californie, USA) . Le bilan de sa politique est mitigé, sans grandes réformes mais dans la continuité de l’essor économique entrepris par Fujimori, signant plusieurs accords économiques internationaux et réduisant sensiblement le seuil de pauvreté. Son mandat est cependant entaché de nombreux mouvements sociaux.
Garcia 2, le retour
Quand il revient de France en 2001, tous les journaux titrent: « Alan est de retour, on va le mettre en prison ». Que nenni! Malgré les soupçons de graves corruptions qui pèsent sur lui et après avoir amené le pays au bord de la ruine, il se représente en toute tranquillité mais se fait battre par Toledo. Par contre il se représente et passe en 2006, face à Ollanta Humala, le nationaliste tonitruant.
Le slogan de sa campagne: je me suis trompé la première fois, maintenant j’ai de l’expérience. Le second mandat de García est très positif avec un essor économique impressionnant avoisinant les 10% de croissance, des progrès sociaux et une continuité de la baisse de la pauvreté déjà entamée par Toledo, qui passe de 54% en 2000 à 31% en 2010. Pourtant, comme du temps de son prédécesseur, les grèves se multiplient, les neuf millions de Péruviens encore dans la misère se moquent pas mal de la bonne santé économique et ressentent même comme un camouflet les annonces faites fièrement dans les médias de l’essor du pays et la diminution de la pauvreté.
Soupçonné de corruption, notamment avec la fameuse affaire Odebrecht, une entreprise de construction brésilienne mettant en cause les dirigeants de 12 pays d'Amérique Latine, Le 17 avril 2019, 8 ans après son deuxième mandat, Alan
Le scandale Lava Jato - Odebrecht
Une puissante entreprise de construction brésilienne est au coeur de la plus vaste corruption en Amérique Latine. En 2016, le Département de Justice des Etats-Unis, dévoile les détails de la méga corruption depuis 10 ans avec de nombreux dirigeants de 12 pays, versant des sommes considérables pour obtenir les marchés locaux.
De nombreux anciens présidents sont soumis à investigation, comme Toledo, Garcia et Humala (son successeur).
Toledo, installé aux USA, est actuellement sous contrôle judiciaire à domicile en attendant son extradition vers le Pérou.
Le 17 avril 2019, la police se présente au domicile d'Alan García pour lui notifier sa mise en examen. A l'âge de 69 ans, l'ancien Président se tire une balle dans la tête au moment de l'arrestation.
2011 - virage à gauche
Ollanta Humala
La campagne électorale de 2011 a fait l’unanimité des candidats sur un thème: la croissance économique du Pérou est impressionnante depuis près de 20 ans, mais les avancées sociales sont encore insignifiantes. Chacun a bien évidemment sa propre solution et c’est finalement le nationaliste Ollanta Moisés Humala Tasso qui l’emporte face à Keiko Fujimori, la fille de l’ancien président.
Considéré comme un marxiste par beaucoup, ex militaire au passé trouble, ami du dictateur vénézuélien Hugo Chávez, il a prôné depuis des années un renversement total du système néolibéral, une nationalisation des entreprises importantes et une renégociation des récents traités commerciaux internationaux. Or deux mois avant l’élection, son discours change complètement, il assure vouloir continuer l’essor économique, jurant sur la bible ne pas vouloir changer la constitution ni prétendre à gouverner éternellement et présentant tour à tour quatre plans de gouvernement totalement différents.
2016 à 2022 - La valse des Présidents
Pedro Kuczynski - 2016 à 2018 (1 an 1/2)
Avec un nom aussi compliqué, on le surnomme PPK. Pedro Pablo Kuczynski Godard est fils d'un médecin allemand/polonais et d'une artiste franco-suisse, il est cousin avec le cinéaste Jean-Luc Godard. Economiste de profession, a fait le conservatoire en Suisse et au Royaume Uni, puis des études à Oxford (Angleterre) et Princeton (USA).
Lui aussi rattrapé dans l'affaire de corruption Odebrecht, il démissione et en 2019 échappe à 3 ans de prison préventive, transformé en assignation à résidence en attendant son procès.
Martin Vizcarra - 2018 à 2020 (2 ans 1/2)
Ingénieur de formation et vice-président de PPK, Martin Alberto Vizcarra Cornejo prend sa succession lors de la démission de ce dernier.
Durant son mandat, un scandale éclate avec des soupçons de corruption pour la construction dun hôpital lorsqu'il était gouverneur régional de Moquegua (sud du pays) 3 ans auparavant. Le congrès présente une motion pour demander la vacance pour incapacité morale, le poussant à démissionner.
Manuel Merino - novembre 2020 (5 jours)
Suite à la démission de Vizcarra, Manuel Arturo Merino de Lama, alors président du congrès, est nommé à la tête du pays. Des voix s'élèvent en considérant cette nommination comme un coup d'état.
Il renoncera 5 jours plus tard.
Francisco Sagasti - 2020 à 2021 (8 mois)
A peine nommé président, Francisco Rafael Sagasti Hochlausler opère de grands changements au sein de la direction de la police. Ce chamboulement est très critiqué.
Au contraire de Vizcarra très critiqué pour sa gestion de la pandémie, Sagasti met tout en oeuvre pour l'acheminement des vaccins.
Son court mandat prend fin avec les élections programmées de mai 2021.
Pedro Castillo - depuis juillet 2021
Cet instituteur de campagne et syndicaliste acharné, séduit la classe populaire avec ses propos marxistes, proposant l'expropriation des familles aisées pour répartir les biens aux plus démunis, la nationalisation des grandes entreprises et son slogan fait mouche: "plus jamais de pauvres dans un pays riche". Toute une partie de la population se met alors à rêver d'une vie prospère, alors que les classes moyennes et aisées sont effrayées avec la peur d'un nouveau Vénézuela ruiné en quelques années.
José Pedro Castillo Terrones l'emporte de justesse face à Keiko Fujimori, la fille de l'ancien président.
Le lendemain de son investiture, la bourse s'effondre, le dollar grimpe tous les jours. Très rapidement, Castillo calme le jeu, discute avec les grandes entreprises, rassure les investisseurs, il n'est pas question de détruire le système économique du pays et 2 mois plus tard, tout s'apaise.
Le Pérou